Spécificités et mise en place des statistiques :
Un opuscule du nom de “Statistiques démographiques des territoires ottomans de l’année 1330”, réalisé en 1920 par la Direction centrale du registre de population du ministère de l’intérieur fut publié en 1936. Ce recensement a été réalisé selon le système d’enregistrement des populations mis en oeuvre depuis 1905.
Le recensement de 1905 est le dernier de ceux qui avaient été organisé par l’État ottoman au 19ième siècle (Sakin, 2011, p. 189-194). La réglementation du recensement qui a été minutieusement élaborée a connut une longue phase de préparation de trois années avant d’entrer en application (Karpat, 2003, p. 75). L’objectif était de palier aux carences observées lors des recensements précédents (DH. MKT. 2418/30). Ce nouveau système, mis en place après 1905 constituera le fondement du système d’enregistrement de la population toujours en vigueur de nos jours (Behar, 1996, p. XVIII).
Par rapport à ceux du passé, il s’agissait également de jeter les bases d’un système pérennisable pour les futurs recensements après celui de 1905. Cette nouvelle réglementation préconisait qu’après chaque recensement un tableau statistique devait être réalisé pour la population féminine et un autre pour la population masculine dans chaque quartiers et dans chaque villages d’un Kaza (forme de département).
Une copie de ces tableaux étaient remise à chaque membres de l’assemblée délibérante du Kaza que chacun devaient signer et tamponner de leurs cachets personnels et officiels avant d’être envoyer par l’intermédiaire du gouverneur au ministère de l’intérieur où ils étaient enregistrer dans le Grand registre de la Direction centrale des populations (İstatistik, p. 2).
Le nouveau système de recensement préconnisait également aux fonctionnaires locaux du département des populations de dresser des tableaux indiquant les personnes qui quittent le département, les nouveaux arrivants, les naissances et les décés, avant de les envoyer à Istanbul par le biais de la Direction des populations du vilayet . A Istanbul, C’est donc après le recensement de 1905 que ces statistiques commeçèrent à être minutieusement enregistrées à Istanbul dans les Grands registres des populations, faisant qu’ainsi à chaque fin d’année, il était possible de connaître la situation démographique du pays (İstatistik, p. 2). Si nous devions déjà faire un premier et bref commentaire, il faut savoir que les statistiques indiquées par nos sources pour les données démographiques en 1914 comprenant les résultats du recensement de 1905 et les statistiques concernant les nouveaux arrivants, les départs, les naissances et les décès de cette même année, ont été, souligons-le, avant tout l’oeuvre de spécialistes en statistiques démographiques.
Comme souligné plus haut, les statistiques ont été publiées en 1920. Ensuite, tout ceci se passe au moment où Istanbul est sous l’occupation des forces de l’Entente, qui de plus, tiennent entre leurs mains à la fois les institutions de l’Empire et à la fois son gouverment-même. C’est pourquoi, compte tenu du fait que rien ne pouvait se faire en dehors du contrôle et de la bienveillence des forces d’occupation, penser que les résultats du recensement de 1914 pourrait prêter à discutionsce semble tout à fait déplacé. Cette situation-là permet donc de rendre caduc de fait toute reactions qui mettraient en cause la crédibilité de ces statistiques.
Les statistiques ont été établies dans les territoires de l’Empire, à savoir en Roumélie, en Anatolie et en Syrie et selon la structure administrative en vigueur en 1914. Cele dit, le recensement n’a pas été réalisé dans les vilayet du Hedjaz, de Bagdad, de Mossoul, du Yemen et dans les sandjaks du Liban (Cebel-i Lübnan), d’Asir (Arabie Saoudite) et de Médine (Medine-i Münevvere), de telle sorte qu’ils ne figurent pas dans les statistiques. Du fait qu’aucun registres n’aient été ouverts dans le sandjak d’Hakari où vivaient quelques Nestoriens et dans les vilayets situés à l’est où vivaient des groupe de sédentaires Kurdes occupant des zones élevés et des groupes de nomades, les statistiques n’ont pu être réalisées (İstatistik, p. 2).
Selon les éléments que nous venons de citer plus haut, voici la liste des populations dans les différents sandjaks et vilayets de l’Empire ottoman:
Islam | 15.044.846 | Grecs | 1.729.738 |
Arménien | 1.161.169 | Juif | 187.073 |
Catholique grec | 62.468 | Catholique arménien | 67.838 |
Portestant | 65.844 | Latin | 24.845 |
Syriaque | 54.850 | Süryani-i Kadim | 4.133 |
Chaldéens | 13.211 | Jacobite d’orient |
6.932 |
Maronite | 47.406 | Samaritain | 164 |
Nestorien | 8.091 | Yezidi | 6.957 |
Coptes | 11.169 | Druzes | 9.385 |
Kazak | 1.006 | Bulgar | 14.908 |
Serbe | 1 | Valaque | 82 |
Total: 18.520.016 |
Les population non recensée se trouvent dans les vilayets de Van (Van, Hakkari), de Bitlis (Bitlis, Muş, Siirt, Bingöl), de Diyarbakır (Diyarbakır, Mardin, Siverek, Maden) et de Mamuratülaziz (Elazığ, Malatya, Tunceli). Voici ci-après les estimations de ces populations :
Muslumans: | |
Van | 122.370 |
Bitlis | 922.999 |
Elazığ | 107.644 |
Diyarbakır | 196.840 |
Nestoriens: | |
Van | 33.999 |
Autres: | |
Van | 2.122 |
A travers les recensements qui ont été effectués au début du 20ième siècle en Anatolie, en Roumelie, en Palestine et en Syrie montrent en tout endroits la présence d’Arméniens, peuple qui tout au long de l’histoire, ne cessa de migrer.
Par conséquent, ces resencements de 1914 couvrent pas moins de 36 unités administratives à travers l’Empire ottoman. 18 d’entre eux sont des vilayets dirigés par un gouverneur et les 18 restants appartiennent à des sandjaks.
Voici ci-après la liste des sandjaks et des vilayets en question et par ordre alphabétique :
Vilayet/Sancak | Population Grégorien | |
1 | Vilayet d’Adana | 50.139 |
2 | Vilayet d’Ankara | 44.507 |
3 | Vilayet d’Antalya | 630 |
4 | Vilayet d’Aydın | 19.395 |
5 | Vilayet d’Beyrout | 1.188 |
6 | Vilayet d’Bitlis | 114.704 |
7 | Vilayet d’Bolu | 2.961 |
8 | Vilayet d’Canik | 27.058 |
9 | Vilayet d’Çatalca | 842 |
10 | Vilayet d’Diyarbekiri | 55.890 |
11 | Vilayet d’Edirne | 19.725 |
12 | Vilayet d’Erzurum | 125.657 |
13 | Vilayet d’Eskişehir | 8.276 |
14 | Vilayet d’Alep | 35.104 |
15 | Vilayet d’Hüdavendigar | 58.921 |
16 | Vilayet d’İçel | 341 |
17 | Vilayet d’Istanbul | 72.962 |
18 | Vilayet d’Izmit | 55.403 |
19 | Vilayet d’Kala-i Sultaniye | 2.474 |
20 | Vilayet d’Afyonkarahisar | 7.437 |
21 | Vilayet d’Karasi | 8.544 |
22 | Vilayet d’Kastamonu | 8.959 |
23 | Vilayet d’Kayseri | 48.659 |
24 | Vilayet d’Konya | 12.971 |
25 | Vilayet d’Jordaine | 1.310 |
26 | Vilayet d’Kütahya | 3.910 |
27 | Vilayet d’Mamuratülaziz | 76.070 |
28 | Vilayet d’Kahramanmaraş | 27.842 |
29 | Vilayet d’Menteşe | 12 |
30 | Vilayet d’Niğde | 4.890 |
31 | Vilayet d’Sivas | 143.406 |
32 | Vilayet d’Syrie | 413 |
33 | Vilayet d’Trabzon | 37.549 |
34 | Vilayet d’Urfa | 15.161 |
35 | Vilayet d’Van | 67.792 |
36 | Vilayet d’Zor | 67 |
En résumé, l’Empire ottoman réalisa au début du 20ième siècle un système de recensement de la populatrion que nous pouvons dire, moderne. Cette rénovation qui commence en 1905 est à la base du système d’enregistrement des populations toujours en vigueur de nos jours.
Le recensement de 1905 a été réalisé en Anatolie, en Roumélie et en Syrie. Ces régions se décomposaient en 36 unités administratives dont 18 vilayets et 18 sandjaks.
Grâce au système des statistiques qui succède au recensement-même, les Kazas et les vilayets pouvaient immédiatement envoyer ces données à Istanbul. Ce système de receuil permanent de données démographiques permettait de faire des réactualisations qui facilitaient le suivi, pour ainsi dire, en temps réel de l’évolution de la population de l’Empire. A propos de ces statistiques, l’une d’elles que nous avons pris comme exemple, concenrne la population de l’Empire en 1914, le résultat fut donc le suivant : la population de l’Empire en 1914 pour les régions où le recensement a pu avoir lieu était de 18520016 habitants dont 15044846 Musulmans et 1161169 Arméniens grégoriens.
Dossier no: 2418/30, 971, 971-1 des archives ottomanes de la présidence du conseil sous les soins du ministère de l’intérieur – Başbakanlık Osmanlı Arşivi, Dahiliye Nezareti Mektubi Kalemi (DH.MKT), Dosya No: 2418/30, 971, 971-1
Cem Behar, “Population de la Turquie et de l’Empire ottoman 1500 – 1927 Osmanlı İmparatorluğu’nun ve Türkiye’nin Nüfusu”, Ankara, 1996,
Kemal Karpat, “Population de l’Empire ottoman (1830-1914) : les particularités sociales et démographiqques Osmanlı İmparatorluğu’nun Nüfusu (1830-1914), Demografik ve Sosyal Özellikleri, İstanbul, 2003..
“Les statistiques démographiques en 1330 dans les territoires ottomans – Memâlik-i Osmâniyye’nin 1330 Senesi Nüfûs İstatistiki”, Istanbul, La direction des populations du ministère de l’intérieur no : 1330, Istanbul Dâhiliye Nezâreti Sicil-i Nüfûs İdâre-i Umûmiyyesi, Dersa’adet 1336.
Orhan Sakin, “La population de l’Empire en 1914 et sa composition ethnique- Osmanlı’da Etnik Yapı ve 1914 Nüfusu”, İstanbul, 2011.